dimanche 27 septembre 2015

Au restaurant, comment affecter les tables aux personnes qui attendent ?



Au restaurant, il arrive que la demande soit forte. Si toutes les tables sont déjà occupées ou réservées, des groupes de personnes attendent leur tour pour obtenir une table. Quelle méthode le restaurateur doit-il utiliser pour affecter les tables ?

Gary Thompson, un chercheur* américain de la célèbre Cornell University, a mené une enquête auprès de 276 managers de restaurants situés principalement en Asie, aux États-Unis et en Europe. Il en ressort que 54 % d’entre eux appliquent la règle de la plus longue attente : par exemple, si une table de quatre couverts se libère, elle sera affectée au groupe (d’une, deux, trois ou quatre personnes) qui a le plus attendu. Mais d’autres (21 %), dans le même cas de figure, affecteront la table de quatre au groupe le plus nombreux (un groupe de quatre s’il y en a, sinon un groupe de trois, etc.). Pour départager deux groupes de même taille, c’est bien sûr le premier arrivé qui est le premier servi. C’est la règle de la plus grande taille. Les autres managers affirment qu’ils appliquent une règle combinée : ils prennent en compte autant l’attente que la taille du groupe.

Les restaurateurs ont raison


Afin de tester quelle était la meilleure méthode, Thompson a réalisé une simulation complexe intégrant de nombreux facteurs (taille du restaurant, intensité de la demande, taille des groupes, acceptation de l’attente, etc.). Il met en évidence que la règle combinée permet d’optimiser le chiffre d’affaires. Celui qui veut appliquer rationnellement cette règle, affectera une table libre au groupe qui aura le plus haut score taille × attente. Celui-ci se calcule en multipliant le nombre de sièges qu’occupera le groupe par la durée de l’attente du groupe. Pour une table de quatre, un groupe de deux personnes attendant depuis 12 minutes passera avant quatre personnes arrivées il y a cinq minutes. La règle combinée requiert un système de classement en temps réel des groupes en attente. Elle s’avère donc difficile à mettre en œuvre dans la plupart des restaurants.

Le restaurateur qui cherche un système plus simple, obtiendra de meilleurs résultats avec la règle de la plus longue attente plutôt qu’avec la règle de la plus grande taille. De plus, il est noté  que la règle de la plus longue attente paraît plus juste aux yeux des clients que la règle de la plus grande taille.

Comme on l’a vu, la règle de la plus longue attente est privilégiée par la majorité les restaurateurs interrogés par Thompson. Ils ont donc, intuitivement, trouvé la bonne méthode.


* Thompson Gary M. An Evaluation of Rules for Assigning Tables to Walk-in Parties in Restaurants. Cornell Hospitality Quarterly, 2014, n° 56(1), p. 91-105.

mercredi 23 septembre 2015

Les défis des serveuses et des serveurs

Trois chercheuses canadiennes* se sont penchées sur le travail du personnel de service dans les restaurants. Elles portent un regard inhabituel sur une réalité bien connue des professionnels.

Des serveuses et serveurs ont été observés durant plus de 30 heures dans des restaurants « familiaux ». Trois défis sont mis en évidence dans le travail des personnels en contact.

Le premier défi est physique : posture debout, déplacements nombreux, rapidité d’exécution, transport répété de charges lourdes. D’où des risques de chutes et de douleurs au niveau du dos et des membres inférieurs. Les employés doivent cependant donner l’impression d’accomplir leur travail avec aisance.

Le défi cognitif (relatif aux connaissances) est bien résumé par une des personnes interrogées : « Pour être serveuse, tu dois avoir toute ta tête ». Elles doivent mémoriser des informations nombreuses, servir plusieurs clients simultanément, être souvent interrompues dans leur tâche et organiser des opérations dans le temps sans en oublier aucune au risque de mécontenter un client.

Le troisième défi est émotionnel. Les serveuses et les serveurs doivent créer pour les clients une atmosphère conviviale. Ils jouent le rôle de tampon entre la cuisine et le client, en cas de retard par exemple. Ils doivent se montrer chaleureux tout en se faisant respecter et en gérant le mépris et le harcèlement de quelques clients.

Des tactiques pour faire face

Globalement les personnes interrogées regrettent que les efforts qu’elles consentent soient peu reconnus par les clients. La rémunération et la reconnaissance de leurs compétences ne leur semblent pas suffisantes compte tenu de leur implication.

Les employés de service découvrent les tactiques pour faire face aux trois défis en observant leurs collègues. C’est aussi à l’usage qu’ils apprennent à gérer ces défis afin de garder un équilibre entre leur productivité et leur santé physique et mentale.



*Laperrière Ève, Messing Karen, Bourbonnais Renée. « Pour être serveuse, tu dois avoir toute ta tête » : efforts et reconnaissance dans le service de table au Québec. Travailler, 2010/1, n° 23, p. 27–57.

lundi 21 septembre 2015

Annoncez les plats aux clients

Une étude montre que le fait d’annoncer le nom du plat au moment de l’apporter au client a une influence positive sur la perception de l’employé et sur le pourboire.

Deux chercheurs bretons* ont réalisé une expérience de psychologie sociale dans un restaurant. Il avait déjà été prouvé que le fait de reformuler le nom du plat au moment de la prise de commande avait une influence positive sur le pourboire. Mais ces chercheurs ont voulu voir si le fait d’annoncer le plat lors de sa distribution avait le même effet.

L’expérience s’est déroulé dans un restaurant situé en Bretagne accueillant principalement une clientèle de professionnels. Les « cobayes » étaient des personnes (101 femmes et 136 hommes) mangeant seul à table. Les chercheurs ont demandé à une serveuse au moment de servir soit d’annoncer le nom du plat ou de la boisson, soit de ne pas le faire. La satisfaction des clients a été mesurée en étudiant le pourboire laissé à l’issue du repas.

Les résultats sont éloquents. Les clients qui ont eu droit à l’annonce du plat ont été 47 % à verser un pourboire d’un montant moyen de 1,65 €. Seulement 31 % des autres ont versé un pourboire de 1,27 € en moyenne.

Principe de communication

Comment expliquer cet effet ? Les chercheurs pensent que le fait de reformuler au moment de la prise de commande ou d’annoncer ce qui  est  servi améliore la perception de la serveuse.

On peut se demander si les résultats auraient été les mêmes dans d’autres conditions d’expérience. Avec de grandes tablées où les discussions sont animées, les convives font sans doute moins attention au personnel de service.

De toute façon, il est toujours judicieux de reformuler et d’annoncer les plats. C’est un principe de communication : il est utile d’envoyer une rétroaction (feedback) pour montrer à l’émetteur (le client) que le récepteur (le serveur) a bien pris en compte la demande.



* Jacob Céline, Guéguen Nicolas. The Effect of Employees’ verbal mimicry on tipping. International Journal of Hospitality Management, 2013, vol. 35, p. 109–111.

mardi 30 juin 2015

Le marketing interne en hôtellerie

Le marketing a d’abord été conçu pour les clients et les prospects. Mais il faut distinguer le marketing externe du marketing interne. Dans cette seconde approche, les employés sont considérés comme des clients internes et leur travail comme un produit qui satisfait leurs besoins et leurs attentes et répond aux objectifs de l’entreprise.

Si les managers ont le souci de pratiquer le marketing interne cela a-t-il un impact sur l’attitude des employés par rapport à leur travail ? Une étude a été menée* auprès de 201 employés de dix hôtels quatre et cinq étoiles de Macao, qui ont accepté de répondre à un questionnaire.

Les résultats sont éloquents. Si les employés perçoivent que le management s’implique dans le marketing interne, leur attitude par rapport à leur travail s’améliore. Le management, ce sont non seulement les chefs de service, mais aussi la direction de l’établissement.

Communication formelle et informelle


En matière de marketing interne, la communication est capitale. Elle prend la forme d’informations descendantes sur la marche de l’entreprise, mais aussi d’enquêtes auprès des personnels pour connaître la perception qu’ils ont de leur emploi. Mais à côté de cette communication formelle mise en place par la direction de l’hôtel, la communication informelle joue un rôle encore plus important. Il s’agit des échanges entre les exécutants et les managers sous la forme de discussions personnelles et spontanées.

En hôtellerie, les managers de proximité, ceux qui sont quotidiennement au contact des équipes, devraient donc être sensibilisés et même formés au marketing et à la communication internes. Dans un contexte où une partie du personnel est immigrée, comme c’est le cas à Macao, ils doivent aussi avoir des compétences en matière de relations interculturelles.



* To W.M., Martin Jr. E.F., Yua Billy T.W. Effect of management commitment to internal marketing on employee work attitude. International Journal of Hospitality Management, 2015, vol. 45, p. 14-21.

lundi 22 juin 2015

La satisfaction dans les restaurants rapides et soignés

Après s’être développés outre-Atlantique, les  restaurants rapides et soignés (fast-casual restaurants en anglais) séduisentde plus en plus les Français. Des enseignes comme Cojean, Exki ou Chipotle proposent une cuisine à base de produits de qualité, un service au comptoir rapide et un décor soigné. Sur quoi repose la satisfaction des consommateurs de ce type de restaurants ? Quel rôle joue le prix ?

Un restaurant Exki
Deux chercheurs américains* ont interrogé 341 clients dans trois restaurants de ce type aux États-Unis. Sans surprise, ils ont mis en évidence que la qualité de la nourriture, la qualité du service et l’environnement physique (décor, musique, couleurs, éclairage) ont un impact positif sur la satisfaction. Ils ont également montré que la satisfaction influence l’intention de revenir dans l’établissement, de le recommander et d’en dire du bien.

Perception du prix

Le plus original est la prise en compte dans le modèle d’une variable : le prix perçu. On sait depuis longtemps que le prix explique le comportement du consommateur. Le prix perçu est un « jugement du client concernant du prix moyen d’un service par rapport à ceux des concurrents ».

Il apparaît que le prix perçu vient modérer le lien entre les trois qualités citées et la satisfaction. Même si la nourriture, le service et l’environnement physique sont de qualité, si le prix est jugé trop élevé, la satisfaction sera diminuée. Autrement dit, dans un restaurant rapide et soigné, le client est aussi attentif au prix. Dans un restaurant rapide (McDonald’s ou Quick), le prix joue peut-être un rôle encore plus important. Cela reste à démontrer.



* Ryu Kisang, Han Heesup. Influence of the Quality of Food, Service, and Physical Environment on Customer Satisfaction and Behavioral Intention in Quick-Casual Restaurants: Moderating Role of Perceived Price. Journal of Hospitality & Tourism Research, 2010, vol. 34, n° 3, p. 310-329.

mardi 16 juin 2015

Défaillance du service et remarques des clients

Faut-il craindre les remarques des clients qui ont subi une défaillance du service ? Les clients qui aiment un restaurant ne font-ils pas des remarques constructives ?

Les clients qui ont développé un lien affectif avec une entreprise de service sont importants. Ils participent à la réussite de l’entreprise par leur fidélité et le bouche-à-oreille positif. Mais il arrive qu’ils soient confrontés à un dysfonctionnement. Dans cette situation, cherchent-ils à aider l’entreprise à s’améliorer ? N’ont-ils pas tendance à se taire pour éviter les conséquences négatives pour un employé précis ?

Deux chercheuses américaines* se sont intéressées aux clients impliqués affectivement avec une entreprise de service. Elles ont proposé un scénario à 247 individus entre 19 et 70 ans : ils devaient imaginer être allés dans un restaurant dans lequel le service avait été particulièrement lent. Les uns devaient penser à un restaurant qu’ils aimaient bien et d’autres à un restaurant qui leur était indifférent. Puis ils devaient indiquer quelle étaient leur réaction en fonction de différentes situations.

Plaintes et remarques constructives

Les auteures font la distinction entre les plaintes et les suggestions constructives. Les premières ont pour but d’obtenir réparation ou d’évacuer la frustration. Les secondes visent à maintenir le lien affectif avec l’entreprise.

L’étude montre que, à la suite d’une défaillance du service, les clients impliqués affectivement souhaitent vraiment aider celle-ci à s’améliorer. Mais ils cherchent aussi à maintenir de bonnes relations avec le personnel en contact. C’est pourquoi, plutôt que de se plaindre, ils font des remarques constructives auprès du directeur du restaurant.

D’une certaine manière, par leur retour d’expérience, les clients sont un peu des employés à temps partiel. Les managers devraient donc s’appuyer sur les personnes liées affectivement à l’entreprise. Il faut les considérer comme une ressource humaine qui peut aider à l’amélioration du service.



* Qing Liu Stephanie, Mattila Anna S. “I Want to Help” versus “I Am Just Mad”: How Affective Commitment Influences Customer Feedback Decisions. Cornell Hospitality Quarterly, 2015, vol. 56, n° 2, p. 213-222.

mardi 9 juin 2015

Mesurer les attentes des clients d'un hôtel ?

Selon certains chercheurs la qualité de service, aux yeux des clients, résulte d’une comparaison entre leurs attentes et leur vécu. Mais comment mesurer les attentes ?

Une équipe de chercheurs américains*, en 1990, a proposé une échelle de mesure. Pour ce faire, ils ont interrogé par téléphone 201 personnes qui avaient séjourné dans un hôtel au moins trois jours au cours de l’année précédente.

L’échelle compte finalement 26 items. Elle est présentée ici. Elle compte cinq dimensions : la fiabilité, l’assurance, la réactivité, les éléments matériels et l’empathie. Pour plus de 90 % des personnes interrogées, la fiabilité est ce qu’il y a de plus important. Ils veulent que tout fonctionne et éviter l’attente. L’assurance est très importante pour 81 % des répondants. Elle est surtout liée à des employés bien formés. Puis viennent la réactivité (très importante pour 64 %) et les éléments matériels (62 %).

Cinquième dimension

La dimension « empathie » regroupe des éléments un peu hétéroclites : comportement du personnel, absence de paperasse, horaires adaptés, services annexes, menus diététiques. Les chercheurs auraient aussi bien pu la dénommer « divers ».

L’intérêt managérial de cette échelle n’est pas évident. Comment – et surtout quand – mesurer les attentes des clients ? Avant qu’ils viennent à l’hôtel ? Mais accepteront-ils de répondre ? Après leur séjour ? Mais leurs réponses seront influencées par leur vécu : ils exprimeront une attente très forte sur la modernité des équipements, s’ils ont eu dans leur chambre une télévision à tube cathodique et une robinetterie antédiluvienne.

Soyons clair. Cette échelle n’a pas grand intérêt.



* Knutson B., Stevens P., Wullaert C., et al. LODGSERV: A Service Quality Index for the Lodging Industry. Journal of Hospitality & Tourism Research, 1990, vol. 14, n° 2, p. 277-284.

vendredi 5 juin 2015

Mesurer la qualité de service d’un restaurant

La qualité de service est une préoccupation de toutes les entreprises… de service. Comment l’atteindre ? Comment la mesurer ? Les restaurateurs disposent d’une échelle afin de l’évaluer.

En 1995, trois chercheurs* de la célèbre université Cornell, aux États-Unis, ont construit une échelle de mesure de la qualité de service d’un restaurant. Ils l’ont nommée Dineserv. Ils se sont appuyés sur les travaux d’autres chercheurs qui avaient créé ServQual, une échelle qui, selon eux, permet d’évaluer tous les types de service. Curieuse idée, car le service fourni par un avocat et dans un fast food n’ont rien à voir.

L’échelle Dineserv comporte 29 items dont la traduction est disponible ici. Elle doit être utilisé lors d’un sondage, auprès d’un échantillon, par exemple un client sur dix sortant du restaurant. Le sondeur se présente, explique qu’il réalise un sondage concernant la qualité de service du restaurant et que celui-ci cherche toujours à l’améliorer. Répondre au questionnaire prend environ dix minutes. Pour chaque item, les clients doivent donner leur avis sur une échelle de 1 (pas du tout d’accord) à 7 (tout à fait d’accord). Ils pourraient aussi compléter le questionnaire sur une tablette que leur prêterait le sondeur ou en ligne. Mais dans ce dernier cas, l’échantillon risque d’être moins représentatif car toutes les personnes sollicitées ne répondront pas.

Calcul du score

Les chercheurs ont déterminé que la qualité de service d’un restaurant comporte cinq dimensions. Les dix premiers items concernent les éléments matériels ; les cinq suivants (11 à 15), la fiabilité du service ; les trois suivants (16 à 18), la réactivité ; les cinq suivants (19 à 24), l’assurance ; les cinq derniers (25 à 29), le personnel.

Pour obtenir un score de la qualité de service globale, le restaurateur doit d’abord calculer la moyenne des items de chaque dimension puis la moyenne des cinq dimensions. Le score obtenu est à étudier en évolution, mois par mois, si on décide de réaliser le sondage mensuellement, ce qui semble judicieux. Il peut aussi être comparé avec celui d’autres restaurants de même type ou de la chaîne.



* Stevens Pete, Knutson Bonnie, Patton Mark. Dineserv: A tool for measuring service quality in restaurants. The Cornell Hotel and Restaurant Administration Quarterly, 1995, vol. 36, n° 2, p. 56-60.

mercredi 27 mai 2015

Soit belle… face au client

Servir, c’est exercer non seulement un travail émotionnel, mais aussi un travail esthétique. Porter un uniforme, se maquiller, utiliser un ton de voix modéré, garder une posture, autant de contraintes pour le personnel en contact.

Les entreprises de service cherchent, à travers le recrutement, la formation, les uniformes et des standards de qualité esthétiques, à mettre face aux clients des personnes agréables. Certaines exigent des employés de véritables compétences de gestion de leur esthétique. L’esthétique du personnel, comme dans les restaurants Hooters, peut être un moyen de se différencier.

Deux chercheurs ont étudié la contrainte que représente pour les employés le travail esthétique. Ils ont interrogé 14 personnes travaillant dans des compagnies aériennes ou des hôtels (management, réception ou restaurant). Ils relèvent que le travail esthétique est source de stress. Tout commence lors du recrutement, bien sûr. Les candidats doivent séduire par leur apparence car ils savent que celle-ci est un critère important.

Au travail et en dehors

Les exigences de l’organisation en matière d’esthétique concernent le dress code, la coupe de cheveux, les postures et la démarche, le ton de la voix, le sourire. Des normes, parfois très strictes, sont établies et des formations mises en place. Les supérieurs hiérarchiques et même les collègues participent au contrôle des standards de qualité esthétiques.

Mais le travail esthétique ne s’arrête pas à la porte de l’entreprise. En dehors du temps de travail, il faut du temps pour soigner sa tenue, se coiffer, se raser et se maquiller. Un budget parfois conséquent est nécessaire pour la tenue si elle n’est pas fournie, la coiffure, les produits cosmétiques et les soins esthétiques. Et pour maintenir sa ligne, il faut non seulement du temps et de l’argent, mais aussi faire des efforts personnels.

Les organisations devraient prendre conscience l’importance du travail esthétique, des contraintes mais aussi des coûts qu’il représente pour les employés en contact.

Tsaur Sheng_Hshiung, Tang Wei-Hsin. The burden of esthetic labor on front-line employees in hospitality industry. International Journal of Hospitality Management, 2013, Vol. 35, p 19-27.

mercredi 4 mars 2015

Malheur aux barbus ?

On le sait, la première impression est importante. Selon des chercheurs en psychologie sociale, un individu porte un jugement sur un autre individu au bout de 100 millisecondes.

La barbe et la moustache font partie des éléments de l’apparence des hommes. Des études ont montré que la « pilosité faciale » est associée à la force, la maturité, la compétition, la confiance en soi, la témérité mais aussi la domination, l’agressivité, le manque de maîtrise de soi et de gentillesse et même l’incompétence. D’ailleurs, jusqu’en 2012, dans les parcs Disney aux États-Unis, la barbe était prohibée.

Des chercheurs* américains ont montré à 102 personnes qui avaient l’habitude de séjourner à l’hôtel, des photos de réceptionnistes d’hôtel. Ils leur ont demandé si elles trouvaient ces employés rassurants, c'est-à-dire à la fois compétents, courtois et fiables. Les employés étaient soit barbus soit rasés et d’origine soit européenne soit africaine.

Règlement intérieur imberbe ?

Les résultats de l’étude sont un peu mitigés. Les réceptionnistes d’origine européenne barbus sont jugés un peu moins rassurants que ceux qui sont rasés. Par contre, pour les réceptionnistes d’origine africaine, la barbe n’a aucune influence.

Les managers doivent-ils inscrire dans le règlement intérieur l’interdiction de la barbe et de la moustache ? Il semblerait que, en France, ils peuvent tout au plus exiger que l’allure générale ne soit pas négligée au point de nuire à l’entreprise. Et la barbe est à la mode, puisque l’on voit même défiler des mannequins à la barbe fleurie.

Yves Cinotti


* Magnini Vincent P., Baker Melissa, Karande Kiran. The Frontline Provider’s Appearance: A Driver of Guest Perceptions. Cornell Hospitality Quarterly, 2013, vol. 54, n° 4, p. 396-405.

En cas de défaillance du service, réagissez !

Comment les clients jugent-ils les stratégies de réparation mises en place dans les hôtels et les restaurants ?

Deux chercheurs* ont étudié les pratiques des professionnels et leur efficacité aux yeux des clients. Ils ont demandé à des étudiants d’interroger des personnes concernant des cas de défaillance du service qu’elles avaient vécus dans un hôtel ou un restaurant. Elles devaient décrire l’incident, expliquer comment il avait été traité et évaluer l’efficacité de la réaction du prestataire de services. Il leur a aussi été demandé si elles avaient décidé de ne plus fréquenter l’établissement mis en cause. Au total, 753 incidents critiques ont été collectés.

Il apparaît que, en restauration, les stratégies de réparation les plus pratiquées en cas de dysfonctionnement, sont en premier lieu le remplacement (d’un plat ne correspondant pas à l’attente, par exemple), puis la gratuité, l’absence de réponse et les excuses. Mais, aux yeux des clients, les réponses adaptées sont, par ordre de préférence décroissante : la gratuité, un rabais, un coupon de réduction pour un prochain repas, l’intervention d’un manager, le remplacement ou la correction (dans le cas d’un plat ne correspondant pas aux attentes), la demande d’excuses et enfin l’absence de réponse. En hôtellerie, le plus apprécié est le surclassement puis le rabais, la gratuité sur un autre service, la gratuité du service, le délogement, la demande d’excuse.

Absence de réaction

Dans 20 % des situations, face à une défaillance du service, les clients ont jugé que l’entreprise n’avait pas réagi. Si bien que 39 % des clients en restauration et 63 % en hôtellerie ont décidé de ne plus fréquenter l’établissement. Pourquoi cette absence de réaction ?

Selon les auteurs, les employés essayent d’éviter les conflits. De plus, ils ne savent pas vraiment ce que la direction attend d’eux. Les tactiques de réparation ne sont pas explicites. Il faut donc former le personnel non seulement à la diminution des défaillances de service, mais aussi à réagir en cas de dysfonctionnement.

* Hoffman K. Douglas, Chung Beth G. Hospitality Recovery Strategies: Customer Preference Versus Firm Use. Journal of Hospitality & Tourism Research, 999, vol. 23, n° 1, p. 71-84.

samedi 28 février 2015

Faut-il habiller les serveuses en rouge ?


Une étude menée dans des restaurants français concluait que les hommes versaient plus souvent un pourboire et d’un montant plus élevé lorsque la serveuse portait un t-shirt rouge. Une étude américaine n’aboutit pas du tout au même résultat.

L’étude française* a été menée durant six semaines dans cinq restaurants au moment du déjeuner auprès de 418 hommes et 304 femmes seuls à table. Onze serveuses non informées de l’objet de l’étude portaient des t-shirts sans aucune écriture ou logo dont la couleur unie variait chaque jour. Les chercheurs ont constaté que les hommes – mais pas les femmes – ont eu tendance à laisser plus souvent un pourboire et d’un montant plus élevé si la serveuse portait un t-shirt rouge (au lieu de noir, blanc, jaune, bleu ou vert).

Des chercheurs américains** de la célèbre Cornell University ont répliqué l’étude avec une méthode très différente. Ils ont montré, à 1 075 femmes et hommes américains, une photo d’une serveuse ou d’un serveur portant une chemise rouge, noire ou blanche. On sait que, aux États-Unis, le pourboire est systématique. Les répondants devaient imaginer qu’ils étaient sur le point de régler une addition de 15,69 $ après un dîner dont la nourriture et le service avaient été bons, mais pas exceptionnels. Après avoir vu la photo, ils indiquaient le montant du pourboire qu’ils auraient envie de laisser et évaluaient le charme de l’employé(e).

Rouge et incompétent ?

Les résultats de l’étude américaine sont très différents. Les hommes comme les femmes ont l’intention de donner un pourboire plus faible aux employé(e)s en rouge. Cependant, comme dans d’autres études, les hommes donnent un pourboire un peu plus élevé aux serveuses qu’au serveur. Par contre, le pourboire des femmes n’est pas influencé par le sexe de l’employé(e). Pour ce qui est du charme, il n’est pas jugé plus grand pour les serveuses et serveurs en chemise rouge. Les chercheurs suggèrent qu’une tenue rouge est associée à une compétence plus faible, à l’agressivité et à la domination.

En l'état actuel de la recherche, la couleur de la tenue des personnels en contact ne semble donc pas avoir d’influence sur le client.

* Guéguen Nicolas, Jacob Céline. Clothing Color and Tipping Gentlemen Patrons Give More Tips to Waitresses with Red Clothes. Journal of Hospitality & Tourism Research, 2012,Vol. 38, n° 2, p. 275-280.


** Lynn Michael, Giebelhausen Michael, Garcia Sheila, Li Yiwei, Patumanon Isara. Clothing Color and Tipping: an attempted replication and Extension. Journal of Hospitality & Tourism Research, 2013, Vol. XX, p. 1-9. 

mardi 10 février 2015

Souriez… le client restera plus longtemps à table


Deux chercheuses* en marketing viennent de montrer qu’un sourire lors de la prise de commande augmente la durée passée à table de 10 minutes.

Ces chercheuses ont observé 493 prises de commande dans des restaurants de chaîne ou indépendants de type brasserie, lors du déjeuner. La clientèle était française et urbaine. Les tables étaient constituées soit uniquement d’hommes, soit uniquement de femmes, soit équilibrées (autant d’hommes que de femmes). L’étude montre que la durée du repas est également influencée par le sexe des personnes.

Les tables d’hommes prolongent leurs repas s’ils sont servis par une serveuse et encore plus si cette dernière sourit. Ce résultat va dans le même sens qu’une autre étude menée aux États-Unis qui avait montré une augmentation du pourboire lorsqu’une serveuse est face à des hommes. Par contre, si des hommes sont servis par un homme, le sourire lors de la prise de commande n’a aucun effet sur la durée du repas.

Se priver de sourire pour renouveler ?

Lorsqu’il s’agit de tables de femmes, le sourire, que ce soit d’un serveur ou d’une serveuse, augmente significativement le temps passé à table. Avec une table équilibrée, seule la prise de commande par une serveuse impacte positivement la durée du repas.

Faut-il en conclure qu’en ne souriant pas lors de la prise de commande, un serveur peut espérer voir les clients partir plus vite et ainsi renouveler les tables ? Peut-être, mais une durée de repas plus longue implique une dépense plus importante. Et une autre étude montre que le sourire du personnel en contact provoque une émotion positive chez le client. La durée du repas n'est pas tout. Le pourboire, la satisfaction et la qualité perçue sont également influencée par le sourire. Alors pourquoi se priver de sourire durant tout le repas ?

* Clauzel Amélie, Riché Caroline. Relation-client et gestion du temps consommation : quel rôle du sourire du personnel en contact en restauration. Revue française du marketing, 2013, n° 244-245, p. 95-111.