Comment segmenter les
consommateurs de vin ? Deux enseignants-chercheurs de l’ESC Pau ont étudié* le rapport au vin des différentes générations. Leur approche est intéressante pour
les restaurateurs.
Les chercheurs ont mené des entretiens auprès de 64
consommateurs et non consommateurs de vin appartenant aux quatre générations différentes.
Ils ont également observé des clients dans des caves, en grandes surfaces, chez
des cavistes et en participant à des journées portes ouvertes dans les
vignobles. Finalement, ils identifient quatre générations au point de vue des
représentations associées au vin, de leurs comportements de consommation et des
phénomènes de transmission et d’apprentissage.
- La génération Héritage, qui a connu la dernière guerre mondiale, pour laquelle le vin est un symbole de la culture française et a un statut mythique. La consommation de vin est régulière et les achats plutôt réalisés auprès de cavistes et à la propriété. Même s’ils ne sont pas rebutés par la complexité de l’offre, ils restent fidèles à quelques références, par habitude. Pour eux, le père a joué un rôle primordial dans la transmission de la culture vin.
- La génération baby-boom,
née après la guerre, qui a bénéficié de la prospérité des Trente glorieuses,
introduit une dimension qualitative dans son appréciation du vin avec une
ouverture au monde. La consommation est plus occasionnelle, hédoniste. Les
achats sont réalisés plutôt en grande surface et le prix est un critère de
choix important. Avec l’augmentation de l’âge et des revenus, certains accèdent
aux « grands vins ». La transmission (par la famille, les amis, les
livres, Internet) de la culture du vin a été importante et synonyme d’élitisme.
- La génération X, qui
a connu les crises économiques, sanitaires et environnementales, est consciente
de la richesse des terroirs, mais fait également part de son ignorance. La
consommation est occasionnelle, lors des repas festifs, et peut même être
ostentatoire. La culture du vin (transmise via Internet, les livres et les
clubs œnologiques) ne motive que les consommateurs réguliers et aisés.
- Les individus de la génération Y sont des consommateurs occasionnels ou des non consommateurs de vin. Ils le connaissent mal, voire se méfient de ses effets. La consommation de vin est associée à des moments exceptionnels (repas de famille ou anniversaires). Elle ne commence – pour ceux qui en boivent – qu’après l’installation dans la vie, entre 25 et 33 ans. Elle est concurrencée par la consommation des alcools blancs. Leur culture du vin est très faible. Ceux qui s’y intéressent utilisent Internet pour s’informer.
Les auteurs notent que l’adhésion au « capital identitaire
» du vin en France décroît sur quatre générations. Celles-ci possèdent une
identité spécifique et se différencient par la fréquence de consommation, le
type et le prix du vin choisi et le mode de transmission de la culture du vin.
* Lorey Thierry,
Albouy Jeanne. Perspective
générationnelle de la consommation de vin en France: une opportunité pour la
segmentation. Décisions Marketing,
2015, n° 79, p. 93–112.
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