Dans un article passionnant, Michèle Forté et Sylvie Monchatre* montrent très clairement que l’idée selon laquelle l’hôtellerie-restauration connaît une pénurie de main-d’œuvre doit être fortement relativisée.
Ces deux chercheuses s’appuient sur les études nationales menées par le Cereq et la Dares ainsi que 25 entretiens auprès d’employeurs indépendants, de directeurs d’établissement de chaînes d’hôtellerie-restauration, de représentants des organisations professionnelles, d’acteurs de la formation à Paris, Lille, Lyon et en Alsace.
Les auteures remarquent que le discours sur le manque de personnel est récurrent chez les employeurs et leurs représentants, surtout lors des phases de reprise économique. Il est vrai que l’indicateur de tension sur le marché du travail atteignait 0,64 en 2012 (1,2 en 2007-2009) pour l’hôtellerie-restauration contre 0,49 dans l’ensemble des professions. Ils notent aussi que la demande d’emploi dans l’hôtellerie-restauration par rapport à la population active dans les CHR est plus élevée que dans l’ensemble des familles professionnelles.
Mais il ne faut pas se fier aux données de Pôle emploi. D’abord parce qu’elles comparent les demandes pour travailler dans l’hôtellerie-restauration et les offres émanant des CHR. Or, les employeurs, lorsqu’ils recrutent via Pôle emploi, embauchent majoritairement des demandeurs postulant dans un autre secteur d’activité. Ensuite parce que seulement une faible part des embauches réalisées passe par Pôle emploi : 7 % dans la région Strasbourg, par exemple. Les employeurs ne s’intéressent quasiment pas aux demandeurs « Pôle emploi » dont les exigences ne correspondent pas à l’offre.
Les CHR utilisent beaucoup les réseaux informels afin de minimiser les coûts de recrutement : ils puisent dans les candidatures spontanées et font appel au « vivier » des apprentis et des élèves de lycée hôtelier, à leurs salariés, au bouche-à-oreille. Les chaînes passent un peu par Pôle emploi pour recruter des personnes sans formation hôtelière. Elles profitent aussi de tous les dispositifs pour recruter des jeunes en échec scolaire, issus des zones urbaines sensibles, des handicapés, des seniors.
Autre argument de Michèle Forté et Sylvie Monchatre pour relativiser l’idée d’une pénurie de main-d’œuvre dans l’hôtellerie-restauration : on aurait dû, au moins dans les périodes de reprise économique, assister à une envolée des salaires. Cela n’a pas été le cas puisque le salaire médian dans les CHR demeure bien inférieur à celui de l’ensemble des familles professionnelles.
* Forté Michèle, Monchatre Sylvie. Recruter dans l’hôtellerie-restauration : quelle sélectivité sur un marché du travail en tension ? La Revue de l'Ires, 2013, n° 76, p. 127-150.
Ces deux chercheuses s’appuient sur les études nationales menées par le Cereq et la Dares ainsi que 25 entretiens auprès d’employeurs indépendants, de directeurs d’établissement de chaînes d’hôtellerie-restauration, de représentants des organisations professionnelles, d’acteurs de la formation à Paris, Lille, Lyon et en Alsace.
Les auteures remarquent que le discours sur le manque de personnel est récurrent chez les employeurs et leurs représentants, surtout lors des phases de reprise économique. Il est vrai que l’indicateur de tension sur le marché du travail atteignait 0,64 en 2012 (1,2 en 2007-2009) pour l’hôtellerie-restauration contre 0,49 dans l’ensemble des professions. Ils notent aussi que la demande d’emploi dans l’hôtellerie-restauration par rapport à la population active dans les CHR est plus élevée que dans l’ensemble des familles professionnelles.
Mais il ne faut pas se fier aux données de Pôle emploi. D’abord parce qu’elles comparent les demandes pour travailler dans l’hôtellerie-restauration et les offres émanant des CHR. Or, les employeurs, lorsqu’ils recrutent via Pôle emploi, embauchent majoritairement des demandeurs postulant dans un autre secteur d’activité. Ensuite parce que seulement une faible part des embauches réalisées passe par Pôle emploi : 7 % dans la région Strasbourg, par exemple. Les employeurs ne s’intéressent quasiment pas aux demandeurs « Pôle emploi » dont les exigences ne correspondent pas à l’offre.
Réseaux informels
Les CHR utilisent beaucoup les réseaux informels afin de minimiser les coûts de recrutement : ils puisent dans les candidatures spontanées et font appel au « vivier » des apprentis et des élèves de lycée hôtelier, à leurs salariés, au bouche-à-oreille. Les chaînes passent un peu par Pôle emploi pour recruter des personnes sans formation hôtelière. Elles profitent aussi de tous les dispositifs pour recruter des jeunes en échec scolaire, issus des zones urbaines sensibles, des handicapés, des seniors.
Autre argument de Michèle Forté et Sylvie Monchatre pour relativiser l’idée d’une pénurie de main-d’œuvre dans l’hôtellerie-restauration : on aurait dû, au moins dans les périodes de reprise économique, assister à une envolée des salaires. Cela n’a pas été le cas puisque le salaire médian dans les CHR demeure bien inférieur à celui de l’ensemble des familles professionnelles.
* Forté Michèle, Monchatre Sylvie. Recruter dans l’hôtellerie-restauration : quelle sélectivité sur un marché du travail en tension ? La Revue de l'Ires, 2013, n° 76, p. 127-150.